MotoGP et WSBK 2024 : Le bon, l'abrupt et le truand : Misano et Cremone

Martin a cru voir venir un week end difficile quand son ennemi No1, Bagnaia, a flingué la pole, le record du circuit puis le sprint. Il avait lâché un paquet de points bêtement lors de Misano1 en rentrant au trop tôt au stand pour changer de pneus à cause d'une pluie qui s'est arrêtée après quelques gouttes. Son avance au général était légère comme un vol de colibri et fragile comme un cheveu ! Le GP démarre avec la superbe photo ci-dessus, Bagnaia est en tête devant Martin et Bastianini, serrés comme ça même des sardines en boîte râleraient, nous on est en extase ! On a vu le reste du GP, j'admire encore Martin, il est vrai que l'on est dans un virage lent, de s'être laissé expulser à dache par un coup de carénage limite violent en pensant aux vingt points à prendre, faire passer la survie à la place de l'orgueil est aussi le signe d'un grand guerrier. En WSBK, Petrucci, un mec inoubliable en fait, même s'il n'a pas un palmarès de folie, arrive à Crémone. Un circuit mais surtout le berceau mondial de la lutherie, là où ont été conçus les fameux violons Stradivarius et Guarnerius au 17ème siècle, ces pièces valent aujourd'hui de quatre à douze millions d'euros et sont prêtées aux grands interprètes par leurs propriétaires... Ce week end à Cremone, le luthier en chef a été Petrucci qui gagne carrément les trois manches de la course. Du coup, le formidable et infortuné Razgatlioglu, qui avait pris une énorme avance en mondial WSBK avec une BMW, marque jamais titrée dans cette discipline, puis a chuté de façon effroyable à Magny Cours et n'a donc pas roulé six manches de suite, est toujours en tête au général ! C'est assez beau comme histoire...

Chez les grimpeurs, j'ai l'honneur de les avoir côtoyés, l'abrupt n'est pas un concept négatif, c'est même digne d'admiration pour ceux qui l'affrontent. On passe même aujourd'hui des pentes dites en toit, en gros dévers, au-delà du vertical... Le dépassement de Bastianini sur Martin a été abrupt, Martin a bien précisé que s'il n'avait pas joué le titre il aurait résisté, c'eût été les deux par terre ou Martin gagnant... Mais il est resté en selle et prend vingt points à Bagnaia dans un championnat qui se joue, en ce qui concerne les points, en mode petits bras. Sportivement en revanche, c'est souvent superbe, Martin est un vrai guerrier, Bastianini aussi, Marquez aussi, comme l'ont été des Rossi, des Agostini, des Hailwood... Bagnaia a été guerrier ce week end mais nous en reparlerons. On a vu aussi un Vietti terminer de façon incroyable en Moto2, avec une trajo au dernier virage lui permettant d'accélérer comme un fou et de gagner alors qu'il avait course perdue... Finalement, contrairement à la violence, l'abrupt c'est sympa parce qu'il n'il n'a y a que les points qui en soient victimes... Après il y a la mauvaise foi totale des pilotes dans leur estimation de cette passe de Bastia. Marquez condamne Bastia parce que s'il avait été rétrogradé, il serait encore trois au général... Bagnaia parce que son coéquipier (qui ne le sera plus en 2025) lui a sauvé cinq points en battant Martin, or je l'ai dit on compte les points comme Onc'Picsou compte ses milliards... Ces cinq points là pèseront forcément lourd à un moment ou un autre du championnat.

Je l'ai écrit en ouverture de ce papier, Dorna qui nous fait un calendrier dément de neuf courses en sept semaines de MotoGP, à dache en plus, truands. On confond pilotes et gladiateurs... Mon confrère Scalera, qui suit les GP sur place, rappelle de façon vacharde mais très vraie que ces marathons, les gens de Dorna s'en foutent, ils voyagent en première classe. Peut être quelques pilotes aussi mais les autres sont à l'arrière en classe bagage. (Une expression à moi, que j'aime bien). Des pilotes, les mécanos, les journalistes, toutes les petites mains des hospitalities, des centaines de gens, des milliers peut-être. Un fait est certain, le décalage horaire touche moins gravement les jeunes sportifs ou les pilotes des avions, qui s'organisent en conséquence en tous cas dans les compagnies non esclavagistes. Pour les vieux qui se croient encore jeunes (mon truc c'est de mettre ma montre à l'heure de l'arrivée dès le décollage, ça marche sur le moral mais l'horloge interne, elle, s'en souvient...) mais l'organisme, lui, déteste ça, sommeil perturbé, cauchemars, la somnolence dans la journée. On considère qu'il faut autant de jours pour récupérer que l'on a passé de fuseaux horaires. L'Indonésie c'est cinq... mais on voyage le lundi et le jeudi on est déjà sur la brèche. L'Australie c'est huit fuseaux ! Mais bon, en Extrême-Orient les circuits ne discutent pas les énormes royalties demandées par Dorna... On passe au deuxième truand, le pneu de Bagnaia (photo ci-dessus, Gold & Goose). Qui explique que son pneu AR a commencé à glisser durant le tour de chauffe, puis dès le début de la course, Marquez l'a vu de loin et a effectivement dit qu'il avait des problèmes. Puis, à mi-course, le pneu remarche, Bagnaia reprend un paquet de temps à Martin et Bastia qui sont devant et alors qu'il a un angle de trente degrés, perd l'adhérence et pilote et machine sont au tas. Les pilotes qui accusent les pneus, c'est depuis que je suis dans ce métier et je suis très vieux. Et dans toutes les disciplines, sur route ou en TT. Mais un pneu qui ne marche pas et qui accroche en milieu de course avant de jeter son pilote comme un fétu de paille, ça, jamais vu... C'est quoi, mauvaise couche sur bonne couche puis mauvaise encore plus bas ? Ou électronique qui m... ? Il y a un truand qui sait mais ne le dira jamais alors on classe sans suites...

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