Fusion Nissan-Honda : Carlos Ghosn brise le silence et parle de 'carnage'

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Une fusion entre Nissan et Honda est en discussion, suscitant à la fois espoirs et doutes. Carlos Ghosn, ancien dirigeant de l'alliance Renault-Nissan, critique vivement ce rapprochement, dénonçant un déséquilibre inévitable entre les deux constructeurs. Pendant ce temps, les enjeux économiques et technologiques poussent l'industrie automobile à chercher de nouvelles alliances pour rester compétitive.

Comme un parfum de drame industriel

Imaginez cette scène classique des décennies passées : une usine japonaise bouillonnante, des ouvriers alignés avec une précision presque chorégraphique, les chaînes d'assemblage battant au rythme d'une technologie en plein essor. À l'époque, Nissan faisait presque figure de maître de cérémonie. Ses véhicules séduisaient la planète, et son partenariat avec Renault ouvrait la voie à une ère de collaborations inédites. Puis, le décor a changé. Aujourd'hui, Nissan est à la croisée des chemins. Ses ventes peinent à rivaliser avec celles de ses concurrents. La transition vers les véhicules électriques, bien que prometteuse, a un coût que la marque peine à absorber seule. L'idée d'une fusion avec Honda, annoncée récemment, s'inscrit dans cette recherche désespérée de renouveau.

Mais cette perspective, bien que spectaculaire sur le papier, s'accompagne d'un lot d'inquiétudes. Carlos Ghosn, figure emblématique de l'automobile et ancien PDG de Renault-Nissan, n'a pas hésité à partager son scepticisme. "Une duplication totale", déclare-t-il à la CNBC, évoquant une fusion qui ferait de Nissan un acteur secondaire sous le contrôle de Honda. Il affirme : "Je pense, sans aucun doute, que Honda sera aux commandes, ce qui est très triste à voir après avoir dirigé Nissan pendant 19 ans [et] amené Nissan au premier plan de l'industrie, de voir qu'ils vont être victimes d'un carnage". Et de poursuivre : "Il n'y a pratiquement pas de complémentarité ici, ce qui signifie que, s'ils veulent faire de la synergie, ce sera peut-être par la réduction des coûts [...] et nous savons exactement qui va en payer le prix. Ce sera le partenaire mineur, et ce sera Nissan"

Une union au goût d'incertitude

Le projet, tel qu'annoncé, repose sur une ambition claire : créer une entité fusionnée, estimée à 54 milliards de dollars, capable de concurrencer Toyota et Volkswagen sur le podium des constructeurs mondiaux. La feuille de route inclut des gains d'échelle, une mutualisation des technologies et une organisation optimisée. Pour Honda, la perspective de partager le développement de véhicules électriques est un atout. Mais pour Nissan, les enjeux sont plus délicats. La capitalisation boursière de Honda dépasse largement celle de son homologue, et les premières discussions laissent entendre que Honda pourrait prendre les rênes de cette nouvelle entité.

La structure envisagée – une société holding cotée à la Bourse de Tokyo – reflète cette asymétrie. Honda nommerait la majorité des membres du conseil d'administration, ce qui ne manquerait pas d'accentuer le déséquilibre entre les deux partenaires. Pour Carlos Ghosn, ce mariage illustre surtout la situation de faiblesse de Nissan. "Ils cherchent quelqu'un pour les sauver", affirme-t-il sans détour. Du côté des analystes, les avis sont partagés. Kei Okamura, gestionnaire de portefeuille chez Neuberger Berman, met en garde contre les écueils d'une intégration post-fusion mal préparée. "À moins que ces entreprises ne soient capables de s'aligner pleinement, qu'il s'agisse du personnel, des actifs ou de la culture d'entreprise, le projet risque de s'effondrer", prévient-il.
Ce défi d'intégration est d'autant plus complexe que Nissan et Honda n'ont pas de complémentarités évidentes. Contrairement à l'alliance historique entre Nissan et Renault, qui s'appuyait sur des synergies claires, la fusion avec Honda repose sur une logique davantage défensive qu'innovante.  En parallèle, Nissan poursuit une restructuration interne, avec une réduction de 20 % de sa capacité de production mondiale et la suppression de 9 000 postes. Un contexte difficile qui pourrait compliquer encore davantage la mise en œuvre d'un projet aussi vaste.

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