MotoGP 2024 Sepang : Le bon, l'abrupt et le tyran

Alonso encore... Et oui c'est le plus beau vainqueur du GP de Sepang. Une piste compliquée, violente (que je n'aime plus depuis la mort de Marco Simoncelli en 2011, fauché en pleine gloire montante). Mais sportivement un monstre, demandez à Iannone qui y a souffert physiquement au point de faire un tour sur deux lentement, pour récupérer ses bras... Alonso a fait son combat habituel, avec une maestria sublime ; Il part derrière la meute, qu'il laisse s'expliquer en mêlée générale, puis il commence à se placer, à repérer les trajos de ceux avec lesquels il va devoir combattre. A Sepang un seul a osé le défier, le Japonais Furusato. Mais coriace ! Qui finira tout près, 88 millièmes, il a donné du fil à retordre au recordman de victoires en petite cylindrée mais rien n'y a fait, Alonso en est à treize sur une saison dont six d'affilée, du jamais vu en 125 ou Moto3. Un autre gros prix d'honneur à un Martin royal une fois de plus en sprint, j'ai déjà dit à leur création que je n'aimais ces courses, il est vrai que c'est d'une brutalité inouïe et Bagnaia a fini par lâcher hier que ces courses il les voue aux gémonies. Car c'est bien là que Martin lui taille des croupières. Pecco, en GP, a été très vainqueur cette année mais le sprint a été son supplice. Autre prix d'honneur pour Fabio Quartararo (Photo ci-dessus, Gold & Goose) cinquième au sprint, six en GP (sur une seule moto, l'autre a été détruite par l'accrochage avec Miller et Binder) tout ça à partir d'une huitième place en grille, ça fait un bien fou ces scores. Dommage, Zarco a failli aussi entrer en top dix, mais il a perdu ce genre de rêve en fin de GP. Mais une Honda douze, même si on est loin des progrès de Yamaha, c'est une vraie avancée.

J'ai eu très peur, quand j'ai vu la tête de Miller accrocher la roue arrière de Quartararo, avec un angle cou/corps effroyable, on a beau se dire que le mec est musclé comme un un jaguar, il y a un moment où la colonne vertébrale va dire qu'elle ne tient plus... En plus, il s'est fait rouler sur les jambes, on sait depuis un accident miracle de Bagnaia que les jambes sont quasiment ce qu'il y a de mieux protégé mais tout ça mis bout à bout, plus l'ambulance qui l'emmène à trois à l'heure, ça m'a rappelé mes souvenirs les plus insupportables de ma carrière. Alors quand je l'ai vu revenir à pied de l'infirmerie sans avoir ôté sa combarde, qu'il porte juste à la taille, avec sa copine « tatoo fan » énorme bonheur, peut-être le plus grand du week end avec la victoire d'Alonso.

Il y a une expression dans le vocabulaire guerrier viking, berserkr. Un guerrier-fauve dans une sorte de fureur sacrée qui le rend surpuissant. Figure reprise dans les légendes germaines et dans les mangas. C'est un peu à ce guerrier invincible que j'ai pensé en voyant Bagnaia (Photo ci-dessus Gold & Goose) passer un pneu Soft à l'avant sur la grille de départ, il sait que Martin est en Medium, signe de guerre absolue. Martin essaie à plusieurs reprises de le passer mais Bagnaia est prêt à tout, y compris à chuter. C'est assez beau dans un championnat où on l'a vu brillant mais pas souvent guerrier, une sorte d'état second. L'orgueil de Martin à ce moment est logique, encore que s'il termine devant Bagnaia il ne sera toujours pas titré, mais pas paroxystique comme l'état de son adversaire. Rien à faire. Le stand de Martin lui impose de réfléchir, de ne pas jeter la cabane sur le chien comme dit mon ami Jean Pierre Goy, le mot Focus est en gros sur le panneautage du stand Pramac. Les deux motos se heurtent grave, plusieurs fois. Le message de Bagnaia est clair, il ne lâchera rien. Ils roulent tous les deux à un rythme démentiel, Martin comprend, il rend la main. Au début Marquez, derrière lui, peut aller le chercher mais il est au-dessus de ses pompes Marquez. Et surtout au-dessus des pompes de sa moto d'occase ! Sur un circuit qu'il n'aime pas en plus, bref, il se met au tas. Martin perd cinq points, ce scénario là est écrit dès la ligne de départ car ils ne font pas la même course, Martin le comprend tard d'ailleurs, lui se bat pour le titre, Bagnaia se bat pour la victoire à tout prix. Si le championnat se joue à cinq points, on saura que tel le viking imbattable, le Berserk Bagnaia a tenu son trophée au bout de l'extrême. Moment certes frustrant car écrit, beau dans la réalisation... Superbe même. Bagnaia réclame la suppression de ces sprints, c'est logique. La presse italienne réclame que les victoires en GP soient infiniment mieux récompensées qu'en sprint. Tout ça sent un peu la frustration. Ou on vire le sprint ou pas, mais là il rapporte moins de la moitié des points d'un GP. Difficile de faire moins vu le risque effroyable de l'exercice...

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