Max Nagl « j'avais besoin d'une nouvelle motivation, d'un nouveau projet »

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Inusable, Max Nagl rempile pour une saison en championnat ADAC cette année. À bientôt 38 ans, le pilote Allemand s’est lancé un nouveau challenge en intégrant une nouvelle équipe – Dorr Motorsport – pour évoluer sur une nouvelle moto – la 450 de Triumph. Avant que l’expérimenté Max ne parte à la conquête d’un 6ème titre national sur ses terres, notre confrère Andy McKinstry lui a tendu le micro; ça parle des nouvelles motivations du vétéran, mais aussi de ses attentes ou de son ressenti à propos du mondial MXGP et des nations . Instructif.

Max, le championnat ADAC s’ouvre ce week-end. Il me semble que tu as remporté ce titre pas moins de 5 fois. Qu’est-ce qui te motive, désormais ?

Ma motivation vient surtout du nouveau projet avec Triumph. C’est l’une des raisons – même s’il y en a eu d’autres – pour lesquelles j’ai quitté Honda pour Triumph; j’avais besoin d’une nouvelle motivation, d’un nouveau projet. Même si c'est beaucoup de travail, et que c’est parfois stressant de commencer quelque chose de tout nouveau comme ça, sans aucune expérience. C’est un vrai challenge mais j’aime ça, et c’est ce qui me motive.

On va dire que je suis aussi plus ou moins l’un des seuls pilotes à rouler sur la 450 de Triumph. C’est un peu comme quand j’étais chez TM en 2018. Ma motivation, c’est de pouvoir rivaliser avec les autres constructeurs qui ont déjà beaucoup d’expérience. Nous, on commence tout juste; c’est aussi ce qui me donne envie de gagner avec cette moto.

Tu passes de Honda à Triumph. Quelles ont été tes premières impressions sur la TF 450-RC ?

J’ai eu la moto en février, car il y a eu un peu de retard. On est allés en Espagne pour tester, et les premières impressions étaient bonnes. On a eu quelques petits problèmes à régler au début, mais c’est normal sur une moto aussi récente; on s’y attendait. Personne n’avait vraiment roulé dessus avant moi, personne n’avait fait de testing, ou roulé des heures avec. J’ai été l’un des premiers à avoir cette moto, et j’ai roulé avec pour voir ce qu’on pouvait améliorer et ce qui était déjà bien d’origine. De là, j’ai continué à bosser sur la moto, à changer des trucs ici et là pour me préparer une moto de course. Les premières impressions étaient bonnes, la moto d’origine avec une bonne base. Les petits détails, tu les modifies toujours. Mais quand la base est bonne, tu peux te préparer une bonne moto de course.

Depuis février, tu as fait beaucoup de changements sur la moto ?

Oui. J’ai fait beaucoup de changements sur la moto. D'abord, tu commences par la base : tu mets ton guidon, peut-être une housse de selle différente. Certains pilotes aiment quand il y a plus de grip, d'autres non. Ensuite, tu montes peut-être des repose-pieds plus larges pour avoir une meilleure position sur la moto. Mais le plus important, bien sûr, ce sont les suspensions. Là, je repars avec KYB et ça m’aide pas mal, car j’ai de l’expérience avec ces suspensions, donc ce n'était pas trop compliqué de faire un setting. Mais là aussi, on a dû repartir de zéro, car tu ne peux pas prendre les suspensions de la Honda et les mettre sur la Triumph; ça ne marche pas comme ça. On a fait beaucoup de testing de ce côté-là.

Ensuite, tu t'attaques au moteur, à l'embrayage aussi. On travaille avec Suter. Ils ont trouvé des solutions pour que l'embrayage fonctionne bien, car il y avait quelques soucis sur la moto d'origine. Mais à part ça, je n'ai pas changé tant de choses que ça. La base est bonne, on va continuer de travailler sur la moto course après course, en essayant de faire des petits ajustements pour progresser et pour qu’elle convienne à mon pilotage.

Ma moto n’est pas très éloignée de la moto d’origine, en fait.

Max Nagl a participé au wintercross de Frankenbach en guise de préparation pour l’ADAC @Dorr Motorsport

Tu évolues pour une nouvelle équipe cette saison, Dorr Motorsport Triumph Racing powered by Krettek. Ça se passe comment ?

La moto est nouvelle, mais l’équipe aussi. De ce côté-là, on manque d’expérience. Ils viennent du milieu automobile; ils ont de l'expérience en sport mécanique, mais pas en motocross. Ils n'ont pas encore toutes les personnes nécessaires pour travailler sur le projet Motocross, donc c'est aussi un gros défi de ce côté-là. Au début, ça va être un peu compliqué d’avoir une bonne structuration, que tout soit prêt. Tout se fait un peu à la dernière minute car l’équipe manque encore d’expérience, et ils doivent apprendre comment gérer le projet.

Le point positif, c’est que j’ai mon propre mécanicien personnel, avec qui je m’entraîne. Ensemble, on travaille vraiment bien et ça aide aussi l’équipe car elle est occupée à faire plein de trucs à la fois. Disons qu’il y a beaucoup de travail en ce moment, mais je savais que ça se passerait comme ça donc ce n’est pas un problème pour moi. Disons que c’est un défi supplémentaire.

L’ADAC fait un stop en France cette année, à Bitche. Tu en penses quoi ?

C’est vrai, il y aura une course à Bitche cette année. J’ai hâte d’y être. J’ai déjà roulé là-bas l’an dernier, et c’était une belle course. C’est un terrain sablonneux, même si c’est moins profond que Lommel. Le tracé est plus typé terrain de terre en fait, parce qu’on monte, on descend, et il y a beaucoup de virages serrés. Comme c’est du sable, ça rend la piste vraiment technique.

On a vu Cairoli & Lupino prendre part à un GP cette année. Antonio en fera d’autres, et participera peut-être à quelques rounds de l’outdoor. Glenn Coldenhoff & Romain Febvre montrent que l’âge, c’est dans la tête. Ça te fait quoi de voir des gars comme ça – plus âgés – toujours au top ?

C’est super à voir, et j’ai toujours su que l’âge n’était pas un problème. Malheureusement, quand j’étais en GP dans les années 2017, 2018 ou 2019 – bien que la tendance ait commencée un peu plu tôt – beaucoup d’équipes et de marques ne juraient que par les jeunes. Les team-managers disaient qu’ils étaient meilleurs, plus frais, plus agressifs, et qu’à 27 ou 28 ans, ta carrière était finie.

C’est top de voir que des gars comme Antonio, Romain & Glenn – et même moi même – prouvent qu’ils avaient tort. Je pense que beaucoup de teams, même les plus importants, réalisent qu’il vaut parfois mieux avoir un pilote plus âgé mais expérimenté qu’un jeune fougueux et agressif. Ramener un bon résultat dans la saison c’est bien, mais ce n’est pas assez. Ce qu’il faut, c’est un pilote régulier, qui est présent à chaque course, qui peut jouer le podium, voir monter dessus au terme du championnat. Ça, ça s’acquiert avec l’expérience.

En plus, un pilote plus expérimenté peut vraiment aider à faire du développement. Il peut aider l’équipe à aller dans le bon sens avec la moto, dire ce qui marche ou ce qui ne marche pas. Je pense que la mentalité commence à changer auprès de certaines équipes. Maintenant, elles comprennent que l’âge n’est qu’un chiffre, et qu’un pilote plus âgé peut être un avantage, et pas un inconvénient. C’est vraiment cool à voir.

Ton objectif principal est le championnat ADAC, mais quelles sont les chances de te voir rouler sur un grand prix cette année ? Je suis certain que les fans Allemands adoreraient te voir en piste à Teutschenthal !

J’ai 37 ans, je vais même avoir 38 ans en août. Je n’envisage pas de participer à un Grand Prix parce que je suis dans un autre état d’esprit désormais. En fait, je ne fais pas de la moto pour m’amuser. C’est mon métier, mon travail, et chaque course me demande beaucoup d’efforts. Je dois prendre des risques pour gagner ma vie, et je ne vois pas l’intérêt de participer à une course à laquelle c’est à moi de payer, et pour laquelle je ne toucherai pas de salaire. C’est ce qu’il se passe en ce moment en MXGP. Si tu n’as pas une grosse équipe derrière toi, qui est prête à te payer pour rouler, la question se pose réellement: à quoi bon ?

Qui paye pour aller travailler ? … Pourtant c’est ce qu’il se passe dans notre sport depuis pas mal de temps. Si je fais des courses en Allemagne, sur le championnat Tchèque, ou même des inter’ en Suisse, en France et en Italie, c’est que je suis payé pour les faire. Il y en a largement assez chaque année, je peux faire quasiment 20 courses par an. Je n’ai donc pas besoin de faire de grand prix. Les risques y sont bien plus importants, et on ne gagne rien. Du coup, je ne vais pas faire de grand prix. Je me concentre sur les courses internationales que j’aime bien. Je choisis mes épreuves, et c’est ce que je vais continuer à faire.

Champion ADAC en 2006n 2008, 2022, 2023 & 2024, Max Nagl vise une sixième couronne cette année @Dorr Motorsport

Qui seront tes plus sérieux concurrents pour le titre sur l’ADAC cette année selon toi ? Roan Van de Moosdijk semble être de retour à un bon niveau après une saison 2024 difficile.

Roan van de Moosdijk est vraiment un bon pilote. Normalement Jordi Tixier est l'un des meilleurs pilotes du championnat, mais malheureusement il s'est blessé. Je n'ai aucune idée de quand il reviendra — s'il manquera juste ce week-end ou plusieurs épreuves; je ne sais pas, mais c'est dommage, car il a été l'adversaire le plus coriace ces deux dernières années.

Il y a aussi Marcel Stauffer, qui fait quelques GP cette année donc il affiche forcément un bon niveau. Et je suis sûr que des pilotes comme Jeffrey Herlings viendront faire des piges sur certaines épreuves. Il y a toujours de bons pilotes qui participent à l'ADAC.

On a interviewé le team-manager de l’équipe Allemande pour les Nations – Marcel Dornhöfer – qui laissait savoir que tu pourrais éventuellement être partant pour rouler à Ironman si tu étais sélectionné cette année. C’est vrai ?

J’avais déjà dit en 2023 que ce serait ma dernière participation, pourtant je suis revenu en 2024 ! J’étais motivé, j’avais fait une bonne saison et j’avais une bonne moto. Malheureusement, ça ne s’est pas du tout passé comme prévu à Matterley l’an dernier, et j’ai été très déçu. J’aimerais bien faire les nations, mais ces derniers temps je ne comprends pas trop ce qu’ils font avec les pistes. C’est vraiment désastreux et surtout, c’est dangereux.

Quand je vois le nombre de blessures en MXGP … Ce n’est pas à cause des motos ou des pilotes, mais à cause de la préparation des pistes qui est vraiment mauvaise. Je n'ai pas envie de toujours critiquer le mondial MXGP, mais c’est ce que tout le monde dit. Je l’ai vu de mes propres yeux à Matterley Basin : ce n'était même plus un terrain difficile, c’était juste un terrain dangereux.

En plus, c’est la dernière course de la saison. Pourquoi risquer de se blesser sur une seule course, même si c’est la plus prestigieuse de l’année ? Cette année, le MXDN se tiendra aux États-Unis, et normalement là-bas les pistes sont mieux préparées, à condition qu'il ne pleuve pas trop. Sur le papier, je ne veux plus participer aux Nations, même cette année. Mais j'imagine que certains de mes sponsors, partenaires — et surtout Triumph — vont sûrement essayer de me convaincre d'y aller. Pour Triumph, ce serait un gros coup d'avoir un bon pilote présent là-bas. Disons que c'est à discuter.

Cela dépendra aussi de ce que fera Ken Roczen. J'imagine qu'il va y participer, puisque c'est aux États-Unis cette année, donc ce sera assez simple pour lui. Il faut aussi prendre en compte le budget — l'Allemagne n'a pas un énorme budget pour cette épreuve.

Il y a deux ans, à RedBud, je n'ai même pas pu amener ma propre moto, j'ai dû louer une KTM d'origine sur place pour rouler, et ça a été une très grosse erreur. Pourtant, j'adorais ce terrain. En 2018, j’avais été vraiment bon là-bas. Mais là, j'avais dû rouler sur une KTM stock, et en plus dans la boue; c’était un vrai désastre. Je ne veux plus revivre ce genre de situation.

Si je fais une course aussi importante, je veux le faire avec ma moto de course, parce que je sais ce que j'ai entre les jambes et je sais que ça fonctionne, que ça a de la puissance. Si je dois encore me pointer avec une Triumph d'origine aux États-Unis, en n'amenant que mon guidon et mes suspensions, c’est non. C’est hors de question. Il faut une vraie moto, prête à performer, capable de bien partir et de faire une bonne course. Sinon je resterai à la maison et je regarderai les nations depuis mon canapé, et je pense que je prendrai plus de plaisir comme ça.

Donc voilà, tout dépendra de l'organisation. On verra comment se déroulera la saison, et comment je me sens physiquement. On prendra ensuite une décision avec l'équipe — ou peut-être qu'ils n'auront même pas besoin de moi. S'ils ont Ken et Simon Längenfelder, ils ont déjà deux des meilleurs pilotes Allemands. Il ne leur manquera plus qu'un troisième. En ce moment, Tom Koch galère un peu, mais il est dans l'équipe officielle Beta, donc pour eux c'est peut-être plus simple d'organiser le voyage jusqu’aux US et d'avoir le matériel sur place. Du coup, ce sera peut-être plus logique que ce soit lui qui y participe à ma place. Bref, on ne sait pas encore. Il faudra en discuter plus tard dans la saison car pour l’heure, rien n’est décidé.

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